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N°26 • Moulin du Pavé

campagne principale de construction : fin du XVIe
Adresse : Le Pavé, St Jean-des-Mauvrets 49320 Les Garennes-sur-Loire

Dénomination de l’édifice : Moulin cavier
Titre courant : Moulin du Pavé dit “de Brissac”

Historique

L’Anjou a été souvent appelé “l’autre pays des moulins” (après la Hollande) car département français ayant possédé le plus grand nombre de moulins : jusqu’à 2 200, pour moitié moulins à eau, pour moitié moulins à vent, dont 650 moulins-caviers (1) qui sont une spécificité de l’Anjou.
Dans les secteurs non-troglodytes de l’Anjou, (toute la partie à sous-sol de schiste) la cave n’est pas souterraine mais incluse dans une construction en élévation, souvent octogonale, la “masse”, murs de schiste, remplissage de terre et d’argile qui assure l’étanchéité de la cave voûtée en tuffeau.

C’est le cas du Moulin du Pavé.

Celui-ci a été construit vers 1580 (sous Henri III) sur la crête du coteau de l’Aubance au point de convergence entre les (ex) communes de Saint-Jean-des-Mauvrets, de Brissac et de Saint-Saturnin, au bord d’une ancienne voie romaine “pavée”, devenue route importante reliant Angers à Poitiers. .

Onze autres moulins sont venus l’y rejoindre (Dix moulins-caviers et un moulin-tour)
Sur les douze moulins, onze étaient des moulins à grains, le 12e étant un moulin à tan (broyage d’écorces de chêne et de châtaignier produisant la poudre nécessaire au tannage des peaux) cinq moulins devaient redevance à l’abbaye de Saint Serge (Angers), six à celle du Ronceray (Angers).
Le moulin du Pavé étant le seul positionné à l’Ouest de la route Angers-Poitiers, sur le fief de la Bâte, dépendait, lui, du Château de Brissac … d’où son nom.

Mais chaque moulin possédait plusieurs dénominations :
Celui-là s’appelle encore « moulin du Pavé » (car sis au lieu-dit « le Pavé »), mais également « moulin de la Haute Bâte », couplé, comme souvent, à un moulin à eau. En l’occurrence le moulin de la Basse Bâte sur la rivière Aubance était en co-visibilité avec le moulin de la Haute Bâte, ayant un même meunier pouvant ainsi produire quelles que soient les conditions météorologiques.
Enfin ce moulin est aussi dénommé « moulin de Terre-Forte » car étant sur une terre argileuse (contrairement à 4 des 12 moulins ayant, entre autres, le nom de moulin de Terre-Pourrie).

Aux archives départementales, on retrouve l’acte de première revente du moulin par Jean Pihoué à René Beau en juillet 1604 … puis la chronologie des propriétaires successifs.

Système Berton Le moulin de l’Arzelier

En 1865, François Lemeunier (le bien-nommé) qui tenait le moulin de son père (lui aussi nommé François Lemeunier) demande l’autorisation d’adopter le nouveau système de voilure, le système Berton, ce qui lui est refusé dans un premier temps car l’ombre des ailes pouvait alors effrayer (!?!) les chevaux des calèches passant sur la route Angers-Poitiers.

En 1905, le meunier Joseph Vaillant fait installer une machine à vapeur dans la dépendance Nord. Le “site” est classé en septembre 1943.

Fonctionnel jusqu’en 1949, le moulin n’est plus entretenu après, ce qui affecte d’abord ses parties aériennes, les ailes devant ainsi être déposées.
Il en retrouvera provisoirement en 1978 à l’occasion d’une restauration partielle dans le cadre de l’opération “100 moulins pour l’Anjou” initiée par Henri Enguehard.

En 1996, il faudra à nouveau le désarmer et sa masse va souffrir de deux effondrements (Nord et Sud). Les voûtes écroulées mettent alors en grand péril la stabilité de l’ensemble et le condamne à une disparition prochaine.

Il est racheté en 2020 par Philippe et Martine Cauwel dans le but d’une restauration complète. Son inscription en 2022 à l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques a permis l’accès à des aides de l’État (DRAC), de la Région et du Département.

Soutenu activement par la Fondation du Patrimoine 49, il a reçu de la Mission Stéphane Bern le titre de “projet emblématique 2023 pour les Pays de la Loire“, avec le financement y afférant.

Celui-ci sera complété par des apports de Mécènes (Mécénat d’aujourd’hui pour le Patrimoine de demain en Anjou, l’Hyper E. Leclerc Brissac… et des dons de particuliers) pour atteindre les 893.000 € nécessaires.

Ce projet a reçu le “Prix du Savoir-Faire” pour les 20 ans de la Fondation du patrimoine Pays de Loire. En effet, ce moulin est un témoin exceptionnel de siècles et de siècles d’un savoir-faire incroyable, tant sur le plan architectural (la pose en 1580 des 12 tonnes de l’ensemble hucherolle et ailes à 17 m de haut sur la pointe d’un crayon !) que sur celui des techniques ancestrales de meunerie.
A noter que l’intégralité des travaux a été réalisée par des artisans du Maine-et- Loire, détenteurs reconnus de ces savoir-faire, notamment l’entreprise de taille de pierre Cottenceau (Saint Hilaire du Bois) et le charpentier-amoulageur Croix (la Cornuaille), un des 3 derniers bâtisseurs de moulins en France.

C’est la conjonction de toutes ces volontés, réunies pour sauver un monument emblématique des paysages, du patrimoine et de la culture angevine, qui vous permet aujourd’hui d’admirer le “Moulin du Pavé”, dit “Moulin de Brissac” tel que l’ont façonné 450 ans d’histoire et 18 générations de meuniers.

Texte de Philippe Cauwel – propriétaire du moulin

Archives des Amis du Moulin de Brissac

Annexes

(1) Qu’est-ce qu’un moulin-cavier ?

La naissance des moulins-caviers résulte de la conjonction de deux facteurs :

  • d’une part la présence en Anjou de deux secteurs troglodytes (dans le falun pour le Douessin, dans le tuffeau pour le Saumurois)
  • et d’autre part l’apport architectural des ingénieurs du Roi René (par ailleurs Roi de Naples, de Sicile … et de Jérusalem, ainsi que d’Aragon tout comme il était comte de Lorraine et de Provence). L’habitat troglodyte impliquait en effet que les activités de “transformation” (foulage, macération, cuvaison, pour la vendange, mouture des céréales pour la moisson) soient réalisées dans des caves Quant aux armées du Roi René, elles avaient rapporté des Pouilles l’idée de la forme originale « conique » de la partie aérienne qui fait l’originalité des moulins-caviers.

Ceux-ci se composent donc de 3 parties :

  • une cave dans laquelle travaille le meunier avec, en mezzanine, ses meules.
  • une structure maçonnée conique, appelée massereau qui ne sert que de protection à l’arbre de transmission du mouvement, appelé le “gros fer”.
  • Ce massereau supporte une structure aérienne en bois, appelée “hucherolle”, cabane en forme de cube qui contient l’arbre dans lequel sont enchâssées les verges porteuses de la voilure (l’ensemble constituant les “ailes”), le rouet et la lanterne qui transmettent le mouvement au “gros fer” qui, lui, le conduit jusqu’aux meules dans la cave.

Restauration 2024